jeudi 23 juin 2011

Les foudroyés, Paul Harding, au Cherche-Midi



L'essence véritable, la recette secrète de la forêt, de la lumière et de l'obscurité, était bien trop ténue et subtile pour être observée à l'oeil nu - poche d'eau et de nerfs, miracle lui-même, lui-même si ténu: attrape lumière. Mais le mystère lui-même ne tient pas à la forêt, la lumière et l'obscurité, mais à autre chose, qu'éparpillent mon regard rustre, mon obtuse volonté. L'étoffe composite de feuilles et de lumière et d'ombre et de froissements de vent pourrait s'entrouvrir et me laisser ainsi entrevoir ce qu'il y a de l'autre côté; une couture pourrait se défaire, ou être défaite. Le tisserand pourrait avoir raté une maille dans le feuillage d'un érable à sucre et cette seule maille (...) se serait décrochée sous l'effet du vent qui sans cesse agace les bourgeons blancs et les feuilles vertes et les feuilles orange et sang et les branches nues(...) peut-être, que j'aurais la chance d'apercevoir parmi le feuillage diapré depuis cette charrette à tiroirs et l'agilité d'atteindre en grimpant au tronc argenté et le courage d'écarter en introduisant un doigt dans la déchirure, et qui offrirait à ce simple toucher une once de tranquillité ou de réconfort.

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