mercredi 30 septembre 2009

mardi 29 septembre 2009

Lalla ou le chant des sables, d'Angèle Paoli, aux éditions Terres de femmes

Comme un phare, le texte d'Angèle éclaire le désert...

Lalla ou le chant des sables, d'Angèle Paoli, aux éditions Terres de femmes

Lalla tressaillit dans son sommeil. Elle continuait de s'enrouler sur elle-même, consciente que son corps se rétractait au fur et à mesure que grandissait la rumeur. Elle pensa confusément au tambour des dunes dont lui avaient parlé ses frères. Elle voulut se secouer mais n'y parvint pas. Dans les alvéoles de sa pensée endolorie, les milliards de grains de sable se heurtaient sournoisement dans le revers des ergs. Le souffle froid et piquant des rouleaux gagnait en force sur l'étendue désertique de son corps. Instinctivement, Lalla se recroquevilla encore davantage. Elle sentait  ses membres se raidir, se déchirer sous l'effet des morsures du sable. C'était donc ça! Sa langue se plia, se déplia, se plia à nouveau dans sa bouche. Il lui sembla qu'elle allait se déchirer...

jeudi 24 septembre 2009

sur la table presque vide


 

sur la table presque vide

 

 

 

sur la table si peu

besoin de si peu

juste une table

dans une chambre presque vide

l’eau/le pain/le papier

 

dans cette chambre inhabitée

vit la lettre V et un peu de Turquie

l’oiseau très bleu ne s’en va pas

il accompagne la lettre V

 

il est là

comme moi

mais lui infiniment là

tandis que moi seulement un peu là

quelques minutes et puis

 

une chambre presque vide

remplie de la difficulté de respirer

et du rire silencieux de ma mère

qui m’accompagne

comme l’oiseau

tandis que sa voix s’éloigne de sa bouche et de ses oreilles

 

demain nous mangerons le pain des morts

dit l’oiseau

et je comprends enfin la langue qu’il chantonne

et à mon tour

je m’éloigne

de l’oiseau et de la chambre

presque vide

 extrait de La voix des hommes, inédit, SD

 

 

 

mardi 22 septembre 2009

les vieilles femmes de la Méditerranée sur le site des Belledonne


Foto di Fabio Bortot, Alvise Nicoletti

Sono a migliaia, ma vivono come esseri invisibili, anonimi, in nero in tanti paesini del Mediterraneo, su tutte le sue coste, senza distinzione. Sono le donne di questo mare, mani consumate e schiene rotte dal lavoro, le rughe che solcano il viso, e i ricordi che riempiono le menti, come ultimo ed unico tesoro rimasto per allietare le lunghe giornate passate su seggiole fuori dai portoni delle case. (Silvia Gatto, Le madri del Mediterraneo)

Elles sont des milliers, mais vivent en invisibles anonymes, toujours vêtus de noir dans la plupart des pays méditerranéens, sur toutes les côtes sans distinction. Ce sont les femmes de la mer, mains brûlées et dos rompu par le travail, les rides qui dessinent le visage, et les souvenirs qui remplissent la mémoire, comme un unique et dernier trésor pour alléger les longues journées passées sur le seuil des maisons, assisses sur une chaise.(trad. S.D.)

Lire le beau texte de Yannis Ritsos en hommage à sa mère sur le site des Belledonne.


samedi 19 septembre 2009

Généalogie de Louis Calaferte



GENEALOGIE
Par mes arrière-arrière-arrière-
grands-grands-pépères et grands-mères-grand
et mères et pères et pères et mères
et par ceux qui les précédèrent
tous ceux si loin si loin si vieux
si vieux zaïeux 
par tous mes macchabées zancêtres
je suis de zorigine humaine

Louis Calaferte


vendredi 11 septembre 2009

La petite joie de Lucetta Frisa


 

 

La petite joie,

 

Le fil et le crochet et

regarde comment on fait et apprends toi aussi

un point après l’autre et puis

la mystérieuse façon de tourner

et commençait alors l’escargot

qui grandissait à chaque rang.

Je regardais tes mains.

De là m’est venue la maladie

de chercher toujours le début de chaque chose.

Mais aucune n’a de prise

pour se laisser attraper.

Il faut des stratégies pour ne pas se blesser.

Au-delà de ce paradis je n’attends rien du destin

ni de ses cercles dentelles horoscopes  guirlandes

à la main des saintes qui savent  faire fleurir

les graines et défaire les nœuds gordiens.

Et je regarde mes doigts  oisifs

qui serrent  encore crayons

petites peaux triturées

- et ce temps à perdre, vide.

Je te rends tout cela

 ne gardant que mon rêve dont je ne me  souviens pas

oh ce rêve qui commença avec toi

resté à tourner en rond entre tes mains

et pas même toi le savais

- nous étions deux déesses qui ne savent rien

parce qu’on ne guérit pas

on ne marche plus

on ne peut plus

- on fait seulement semblant.

 

 

extrait de Ritorno alla spiaggia

(Retour à la plage),

recueil de Lucetta Frisa, poésies 2001-2007

aux éditions La vita felice, Milan