mercredi 25 août 2010

Lorenzo Pittaluga, 1967-1995


 Prends-moi par la main et conduis-moi

vers la lenteur, dessine les contours

de mon visage et la lumière le traversera

là où vit l'oiseau sans nom.

 

 

POETE

 

Il nait aux alentours de Gênes, le 24 mai 1967.
Son père meurt d’une tumeur au poumon quand il est âgé de 9 ans, la mère d’une crise d’urémie, après une hospitalisation en psychiatrie, quand il a 15 ans. Il vit depuis tout petit avec une vieille tante bigote. A 17 ans, premier délire : en pleine nuit, dans son village natal, il erre d’une maison à l’autre, frappe à la porte et crie qu’il est un saint. Quelques mois après, première tentative de suicide.

Il rédige des carnets introspectifs, des récits symboliques, des aphorismes, des poèmes. Alternent les périodes d’internement et de brefs épisodes d’explosion créative. Il parvient, en période d’exaltation créative, à écrire neuf poèmes par jour. Il les écrit à la main, ne sachant pas se servir d’une machine à écrire. Refuse de corriger les moins bons et les détruit. Il fume, boit et écoute des chanteurs italiens, enfermé dans sa chambre aux murs couverts d’images religieuses. Son premier livre, en 1987, a pour titre une phrase de Rimbaud : arcs en ciel tendus comme des rênes. Ce sont des proses brèves, voire très brèves, parmi lesquelles la Crucifixion où il décrit un Christ-Messie qui apparaît soudainement dans une ville de province et s’assoit sur une barrière, vomissant de l’ammoniaque. En 1989, il publie sa première plaquette de poésie : Notes marginal s d’un ventriloque de province, et vont suivre d’autres recueils, Poésie du premier jour, Arc du fleuve, et son premier volume de vers : Les heures de la soif.

Tous les matins, il les passe en hôpital de jour, écrivant des histoires et des poèmes avec son psychiatre. Il lit de manière désordonnée : Trakl, Luzi, Campana. Il essaie de travailler comme pâtissier, mais seulement quelques mois : fréquents malaises et évanouissements. Dans les dernières années, les tentatives de suicide augmentent : en tout, seize.

Quand il est très dépressif, il se réfugie dans l’alcool. Il tente de vivre, pendant de brèves périodes, dans des communautés religieuses. Il quitte définitivement son travail. Toujours plus distrait, troublé, indécis. Les hallucinations augmentent. A son psychiatre, il ordonne : « Dis-moi que je suis Dieu ou tu ne sors pas vivant d’ici ! ». Le psychiatre se tait et lui, le gifle violemment.

Obsédé par l’écriture, il  a le projet d’un livre de poésie avec des photographies de son frère. En décembre 1995, durant le énième internement, il fait semblant d’aller mieux, demande une permission de sortie, monte au dixième étage et se jette dans le vide. Quelques mois plus tard, paraît, à titre posthume, son dernier livre, L’indulgence. Trois ans plus tard, sa tante meurt, brûlée vive dans l’incendie de sa maison.

 

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