...Les bagages, image de l'épuisement. Le jour baissait derrière la fenêtre. Il me semblait que la lumière déclinait par à-coups, et je me pris à pense : Et si ce n'était pas le jour, mais ma vue qui baissait? Déjà je me voyais, les mains tendues, tâtonner vers la sortie, et, dehors, fourrager dans l'air à la recherche de la rampe. Et appeler à l'aide. et si mon coeur lâchait? Ne reste pas là comme ça, remue-toi Je n'osais même pas enlever mon manteau. je pris le trousseau de clés sur la table à côté du fauteuil monumental et m'apprêtai à quitter l'appartement. Je fermai, descendis les marches d'un pas énergique - pour me donner du courage? En tout cas, je ne voulais pas qu'on me vît passer devant la loge avec cet air de chien battu.
A peine dehors, le peu de courage que j'avais rassemblé s'était déjà évanoui. Je traversai la rue et collai mon visage contre la vitrine d'une quincaillerie. Elle donnait à voir les objets les plus inutilisables, me semblait-il, tant ils étaient désuets (...). Un Hadès.
A coté c'était un fourreur. Juste derrière la vitrine il y avait, sur un chevalet, une gravure coloriée montrant une coquette en fourrure, j'en déchiffrai le titre: La Fourrure de la Truite. La fourrure de la truite?
Paul Nizon, La fourrure de la truite, Actes sud babel, 2006
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